Une découverte inattendue dans un champ polonais
Dans la région de Zewierszczów, à l’est de la Pologne, un passionné d’archéologie amateur équipé d’un détecteur de métaux a fait une découverte spectaculaire : plus de 5 000 pièces anciennes enfouies depuis plusieurs siècles.
Le site, purement agricole, ne présentait aucune trace de construction, mais le signal du détecteur n’a laissé aucun doute. L’inventeur a aussitôt prévenu les autorités, permettant une intervention rapide des archéologues.
Des “boratynki” : symboles d’une économie en tension
La majorité des pièces découvertes sont des boratynki, des monnaies de cuivre émises massivement sous le règne de Jan II Kazimierz au XVIIe siècle. Ces petites pièces de faible valeur étaient frappées pour financer l’armée et combler les déficits publics.
Cette politique monétaire, si elle a permis à l’État de respirer un temps, a aussi inondé le marché de cuivre et contribué à déséquilibrer le système économique polonais. Le seigneuriage – la différence entre la valeur réelle et la valeur faciale – servait alors de ressource financière, mais au prix d’une inflation rampante.
L’argent, la richesse cachée
Parmi ce vaste amas, les chercheurs ont identifié 29 pièces en argent datant de la fin du XVIIe au début du XVIIIe siècle, certaines frappées sous Jean III Sobieski ou Léopold Ier.
À cette époque, le métal précieux se faisait rare. Sa présence dans le trésor traduit une volonté claire de préserver un capital plus stable, à l’abri des dévaluations du cuivre. Ces pièces en argent servaient moins aux transactions qu’à la protection d’un patrimoine, souvent enfoui en période d’incertitude.
Reflet d’une époque troublée
La Pologne du XVIIe siècle fut marquée par les guerres, les crises politiques et les réformes budgétaires successives. Ce dépôt monétaire n’est probablement pas un simple oubli, mais le geste d’un propriétaire inquiet, qui aurait préféré cacher ses économies plutôt que de risquer de tout perdre.
De nombreux trésors de ce type émergent d’ailleurs à des périodes de panique ou de conflit, témoignant d’une économie sous pression et d’une confiance ébranlée dans la stabilité monétaire.
Une restauration méticuleuse
Transporté au musée de Hrubieszów, le trésor fait désormais l’objet d’un examen minutieux. Chaque pièce est nettoyée, identifiée et répertoriée : traces d’usure, marques de frappe, fibres textiles éventuelles d’un sac d’origine…
Ce travail de fourmi permettra de reconstituer l’état initial du dépôt et d’en tirer de précieuses informations sur les usages monétaires et la circulation de l’argent au quotidien.
Une fenêtre sur la vie économique d’autrefois
Au-delà de sa dimension archéologique, cette trouvaille raconte la réalité économique d’une famille ordinaire au XVIIe siècle. Le mélange de cuivre courant et d’argent rare représente un “portefeuille” figé dans le temps, révélant les habitudes d’épargne et la hiérarchie des valeurs dans la société d’alors.
Les historiens pourront ainsi confronter ces données matérielles aux archives royales pour affiner leur compréhension des flux monétaires et du pouvoir d’achat de l’époque.
Préserver la mémoire collective
La législation polonaise encadre strictement ce type de découverte. Les objets sont remis à des institutions publiques pour étude et exposition, garantissant que ce patrimoine commun ne soit pas dispersé dans des collections privées.
Cette approche favorise une transmission du savoir et permet au grand public d’accéder à des fragments tangibles de l’histoire économique et sociale du pays.
Une valeur historique bien plus qu’économique
Si la valeur marchande de ces pièces reste modeste, leur portée historique est immense. Ce trésor éclaire les tensions financières du XVIIe siècle, les comportements d’épargne en temps de crise et les transformations d’une économie en mutation.
En un sens, il nous rappelle qu’à chaque époque d’incertitude, l’humain cherche à protéger ce qu’il possède – qu’il s’agisse de cuivre, d’argent, ou aujourd’hui d’or ou d’actifs tangibles.



